28/04/2022

Entretien avec Françoise Le Failler

M2R FILMS : Quel est le rôle de l’ONF ?

Françoise Le Failler : La France est un grand pays forestier. 75% de nos forêts sont privées et 25 % publiques. C’est sur cette dernière partie qu’intervient l’ONF qui est le gestionnaire des forêts domaniales (qui appartiennent à l’Etat) et communales. Nous intervenons à 3 niveaux : - la production de bois pour assurer le renouvellement de la forêt et pérenniser sa diversité, approvisionner les industriels et garantir à la société l’utilisation d’un matériau et d’une source d’énergie renouvelable et sobre en carbone …

- La protection de la biodiversité car la forêt et un grand réservoir de biodiversité.

- Et enfin, la forêt est un lieu de ressourcement, de nature et on sait aujourd’hui qu’elle accueille en France 700 millions de visites chaque année. Dans cette période de pandémie post-confinement, nous avons observé un besoin, un désir de nature très important.

M2R FILMS : Quel est le plus grand défi que l’ONF a à relever aujourd’hui ?

Françoise Le Failler : Il n’y a pas à hésiter, c’est le réchauffement climatique ! Il est rapide et ne permet pas à la forêt de s’adapter seule et sans aide. Cela se caractérise par des attaques climatiques intenses : des tempêtes, de la sécheresse, des incendies, des attaque sanitaires comme le scolyte (petit insecte xylophage de l’ordre des coléoptères) qui décime nos épicéas ou encore la maladie de l’encre (due à un pathogène microscopique présent dans le sol qui se propage d'arbre en arbre dans l'eau du sol et provoque la nécrose des racines par lesquelles les arbres se nourrissent) qui attaque nos châtaigniers. Et même le chêne qui est un peu le roi de nos forêts commence à souffrir de la sécheresse. Il se trouve dans un état que les forestiers qualifient de stress hydrique.

 

Dans ce contexte de changement climatique, ces attaques annoncent in fine la mortalité des arbres. Si l’on retient cela, c’est le plus important.

Les forestiers ne disent pas qu’ils ont la réponse mais que le pire serait de ne rien faire. Ils cherchent… Nous mettons en place des actions concrètes afin d’expérimenter et de voir comment la forêt réagit dans la durée. La notion fondamentale à retenir est la diversité et en premier lieu celle des essences. Il faut savoir que ces expérimentations sont sous surveillance, pilotage, que si l’on fait un choix d’essence nouvelle, c’est que l’on pense qu’elle n’est pas invasive. Comme dans toute expérimentation, nous ne sommes jamais sûrs de rien, nous surveillons cela comme le lait sur le feu ! Nous stoppons tout au moindre soupçon. Ce sont des actions expérimentales très pilotées menées avec une grande attention.

Aujourd’hui nous avons une centaine d’îlots d’avenir, répartis partout en France pour voir comment cela réagit. Ils représentent environ 0,5% de la surface des forêts domaniales. Nous les concevons sous forme d’investigations scientifiques pour mobiliser des connaissances à horizon 20 ou 30 ans. C’est vraiment très petit, il ne s’agit pas de concept massif contrairement à ce que le grand public peut redouter.

M2R FILMS : Quels sont vos pires ennemis ?

Françoise Le Failler : C’est encore et toujours le réchauffement climatique. C’est notre plus grande inquiétude. De quoi sera faîte la forêt de demain ? Les forestiers ont le souci du long terme et veulent transmettre, c’est le sens de leur mission, une forêt « en bon état » aux générations futures. Et malheureusement avec toutes les attaques que nous venons d’évoquer, nombreuses sont les interrogations et nous ne sommes pas certains de la réponse.

 

M2R FILMS : La biodiversité étant un enjeu international, quelles sont vos relations avec les pays frontaliers de la France ou même à l’échelle mondiale ?

Françoise Le Failler :

Pour l’international, l’ONF dispose d’une filiale ONF International (ONFI), créée en 1998, qui est spécialisée dans la gestion durable des écosystèmes et la lutte contre le changement climatique. Cette filiale promeut l’expertise forestière et environnementale de l’ONF dans plus de 50 pays, principalement en Amérique latine et en Afrique centrale ainsi que dans les DOM et les collectivités d’outre-mer (la Nouvelle-Calédonie et Saint-Pierre-et-Miquelon). Chercher,  inventer,  développer  des  modèles  de  production  des  terres  plus respectueuses des hommes et de l’environnement est au cœur des missions d’ONF International.

M2R FILMS : Quel regard portez-vous sur la prolifération des pandémies liées à la perte de biodiversité ?

Françoise Le Failler : Quand on dit pandémie, à l’ONF nous pensons directement aux scolytes qui ont détruit nos épicéas, à la chalarose (maladie fongique) qui aujourd’hui est en train de décimer les frênes, ou encore à la disparition des ormes du paysage européen il y a une vingtaine d’années. Les pandémies peuvent avoir pour conséquence directe la mort d’essences de nos territoires ! Et le drame, c’est que les maux peuvent se cumuler tels que sécheresse plus maladie !

M2R FILMS : Comment remédiez-vous à ces maladies ?

Françoise Le Failler :

Quand on fait le constat du scolyte par exemple, nous mettons en place des coupes sanitaires pour éviter la propagation. Le but est de circonscrire au maximum l’incendie. Dans la région de Verdun notamment, il a fallu procéder à des coupes sanitaires intenses car il fallait sauver la forêt.

 

 

M2R : Qu’est-ce qui vous a motivé dans notre partenariat ?

Françoise Le Failler :

Nous avons été invités à être partenaire du film de Marie-Monique Robin par l’intermédiaire de Juliette Binoche qui était déjà en relation avec des équipes de l’ONF. Ce qui nous motive c’est de sensibiliser le grand public à l’avenir menacé des espaces naturelles et évidement des espaces forestiers. On est très heureux de ce partenariat qui on l’espère donnera de la visibilité à ces sujets de protection des espaces naturels et des forêts.

 

* * *

 

L'étude "Perceptions des Français sur les forêts françaises" de Viavoice pour l'ONF réalisée du 16 au 19 février 2021 sur près de 1 000 Français, majeurs, vivant sur le territoire métropolitain montre que :

 

  • 4 Français sur 10 vont en forêt au moins A fois par mois.
  • 9 Français sur 10 considèrent que les forêts sont synonymes de bien-être et d’apaisement.
  • 55% des Français ressentent le besoin d’aller en forêt.
  • - 6 Français sur 10 déclarent que le contexte actuel a renforcé leur envie d’aller en forêt.
  • 3 français sur 4 déclarent être intéressés par les sujets liés à la forêt.
  • Pour les Français, les principales menaces qui pèsent sur la forêt sont :
  • A 15% l’urbanisation, à 46% la déforestation, à 25% la négligence et les activités humaines.

65% des Français se disent préoccupés par la situation des forêts en France.

  • 3 Français sur 4 pensent que le réchauffement climatique met les forêts en danger.


 

 

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M2R FILMS : Quel est le rôle de l’ONF ?

Françoise Le Failler : La France est un grand pays forestier. 75% de nos forêts sont privées et 25 % publiques. C’est sur cette dernière partie qu’intervient l’ONF qui est le gestionnaire des forêts domaniales (qui appartiennent à l’Etat) et communales. Nous intervenons à 3 niveaux : - la production de bois pour assurer le renouvellement de la forêt et pérenniser sa diversité, approvisionner les industriels et garantir à la société l’utilisation d’un matériau et d’une source d’énergie renouvelable et sobre en carbone …

- La protection de la biodiversité car la forêt et un grand réservoir de biodiversité.

- Et enfin, la forêt est un lieu de ressourcement, de nature et on sait aujourd’hui qu’elle accueille en France 700 millions de visites chaque année. Dans cette période de pandémie post-confinement, nous avons observé un besoin, un désir de nature très important.

M2R FILMS : Quel est le plus grand défi que l’ONF a à relever aujourd’hui ?

Françoise Le Failler : Il n’y a pas à hésiter, c’est le réchauffement climatique ! Il est rapide et ne permet pas à la forêt de s’adapter seule et sans aide. Cela se caractérise par des attaques climatiques intenses : des tempêtes, de la sécheresse, des incendies, des attaque sanitaires comme le scolyte (petit insecte xylophage de l’ordre des coléoptères) qui décime nos épicéas ou encore la maladie de l’encre (due à un pathogène microscopique présent dans le sol qui se propage d'arbre en arbre dans l'eau du sol et provoque la nécrose des racines par lesquelles les arbres se nourrissent) qui attaque nos châtaigniers. Et même le chêne qui est un peu le roi de nos forêts commence à souffrir de la sécheresse. Il se trouve dans un état que les forestiers qualifient de stress hydrique.

 

Dans ce contexte de changement climatique, ces attaques annoncent in fine la mortalité des arbres. Si l’on retient cela, c’est le plus important.

Les forestiers ne disent pas qu’ils ont la réponse mais que le pire serait de ne rien faire. Ils cherchent… Nous mettons en place des actions concrètes afin d’expérimenter et de voir comment la forêt réagit dans la durée. La notion fondamentale à retenir est la diversité et en premier lieu celle des essences. Il faut savoir que ces expérimentations sont sous surveillance, pilotage, que si l’on fait un choix d’essence nouvelle, c’est que l’on pense qu’elle n’est pas invasive. Comme dans toute expérimentation, nous ne sommes jamais sûrs de rien, nous surveillons cela comme le lait sur le feu ! Nous stoppons tout au moindre soupçon. Ce sont des actions expérimentales très pilotées menées avec une grande attention.

Aujourd’hui nous avons une centaine d’îlots d’avenir, répartis partout en France pour voir comment cela réagit. Ils représentent environ 0,5% de la surface des forêts domaniales. Nous les concevons sous forme d’investigations scientifiques pour mobiliser des connaissances à horizon 20 ou 30 ans. C’est vraiment très petit, il ne s’agit pas de concept massif contrairement à ce que le grand public peut redouter.

M2R FILMS : Quels sont vos pires ennemis ?

Françoise Le Failler : C’est encore et toujours le réchauffement climatique. C’est notre plus grande inquiétude. De quoi sera faîte la forêt de demain ? Les forestiers ont le souci du long terme et veulent transmettre, c’est le sens de leur mission, une forêt « en bon état » aux générations futures. Et malheureusement avec toutes les attaques que nous venons d’évoquer, nombreuses sont les interrogations et nous ne sommes pas certains de la réponse.

 

M2R FILMS : La biodiversité étant un enjeu international, quelles sont vos relations avec les pays frontaliers de la France ou même à l’échelle mondiale ?

Françoise Le Failler :

Pour l’international, l’ONF dispose d’une filiale ONF International (ONFI), créée en 1998, qui est spécialisée dans la gestion durable des écosystèmes et la lutte contre le changement climatique. Cette filiale promeut l’expertise forestière et environnementale de l’ONF dans plus de 50 pays, principalement en Amérique latine et en Afrique centrale ainsi que dans les DOM et les collectivités d’outre-mer (la Nouvelle-Calédonie et Saint-Pierre-et-Miquelon). Chercher,  inventer,  développer  des  modèles  de  production  des  terres  plus respectueuses des hommes et de l’environnement est au cœur des missions d’ONF International.

M2R FILMS : Quel regard portez-vous sur la prolifération des pandémies liées à la perte de biodiversité ?

Françoise Le Failler : Quand on dit pandémie, à l’ONF nous pensons directement aux scolytes qui ont détruit nos épicéas, à la chalarose (maladie fongique) qui aujourd’hui est en train de décimer les frênes, ou encore à la disparition des ormes du paysage européen il y a une vingtaine d’années. Les pandémies peuvent avoir pour conséquence directe la mort d’essences de nos territoires ! Et le drame, c’est que les maux peuvent se cumuler tels que sécheresse plus maladie !

M2R FILMS : Comment remédiez-vous à ces maladies ?

Françoise Le Failler :

Quand on fait le constat du scolyte par exemple, nous mettons en place des coupes sanitaires pour éviter la propagation. Le but est de circonscrire au maximum l’incendie. Dans la région de Verdun notamment, il a fallu procéder à des coupes sanitaires intenses car il fallait sauver la forêt.

 

 

M2R : Qu’est-ce qui vous a motivé dans notre partenariat ?

Françoise Le Failler :

Nous avons été invités à être partenaire du film de Marie-Monique Robin par l’intermédiaire de Juliette Binoche qui était déjà en relation avec des équipes de l’ONF. Ce qui nous motive c’est de sensibiliser le grand public à l’avenir menacé des espaces naturelles et évidement des espaces forestiers. On est très heureux de ce partenariat qui on l’espère donnera de la visibilité à ces sujets de protection des espaces naturels et des forêts.

 

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L'étude "Perceptions des Français sur les forêts françaises" de Viavoice pour l'ONF réalisée du 16 au 19 février 2021 sur près de 1 000 Français, majeurs, vivant sur le territoire métropolitain montre que :

 

  • 4 Français sur 10 vont en forêt au moins A fois par mois.
  • 9 Français sur 10 considèrent que les forêts sont synonymes de bien-être et d’apaisement.
  • 55% des Français ressentent le besoin d’aller en forêt.
  • - 6 Français sur 10 déclarent que le contexte actuel a renforcé leur envie d’aller en forêt.
  • 3 français sur 4 déclarent être intéressés par les sujets liés à la forêt.
  • Pour les Français, les principales menaces qui pèsent sur la forêt sont :
  • A 15% l’urbanisation, à 46% la déforestation, à 25% la négligence et les activités humaines.

65% des Français se disent préoccupés par la situation des forêts en France.

  • 3 Français sur 4 pensent que le réchauffement climatique met les forêts en danger.


 

 

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