12/10/2023

« Vive les microbes ! » donne la parole aux chercheuses !

Félicia Keesing (Photography: pbs), biologiste, écologue, à l’origine du concept de l’effet dilution – témoigne dans « La fabrique des pandémies » // Maria Yazdanbakhsh (Photography: Studio Oostrum) immunologiste témoigne dans « Vive les microbes ! »

Un film et quatre femmes de talent

Au moment de la diffusion de La fabrique des pandémies, une de nos grandes fiertés était d’avoir réuni pour sa production quatre femmes de talents : l’actrice Juliette Binoche, la dessinatrice Valentine Plessy, la compositrice Émily Loizeau et la réalisatrice Marie-Monique Robin. Une fierté pourquoi ? Parce que trop souvent la production audiovisuelle relègue les femmes à l’arrière-plan. La dernière enquête du CNC [1] nous rappelle ainsi que seulement 30 % des films d’initiative française agréés sont strictement réalisés par des femmes. Ce chiffre fait tristement écho avec le suivant, tiré du secteur de la recherche : selon l’agence statistique de l’UNESCO [2], moins de 30% des scientifiques dans le monde sont des femmes.

La science, cas d’école de la surreprésentation masculine

Marie-Monique Robin (dont nous vous conseillons par ailleurs le film sur le planning familial) s’efforce de valoriser les femmes à travers des représentations non stéréotypées. En effet, proposer des modèles féminins positifs donnera aux jeunes générations plus de chances d’évoluer vers une société plus équilibrée.

Pour « La Fabrique des Pandémies », la réalisatrice s’est pourtant heurtée à la surreprésentation de la gent masculine dans les milieux académiques qu’elle a sollicités. Difficile en effet d’obtenir la parité parmi les ténors de l’écologie de la santé ou de l’épidémiologie. Pourtant, les femmes sont loin d’être absentes du secteur de la recherche en biologie (un chiffre parmi d’autres : à la rentrée 2020, 63 % des étudiants en sciences de la vie sont des femmes et 31 % en sciences fondamentales [4]) mais là comme ailleurs, elles se heurtent au fameux « plafond de verre » qui les empêche de progresser ou même de se maintenir dans la carrière [3] - Felicia Keesing et Patricia Wright étaient donc dans « La Fabrique des pandémies » les arbres remarquables qui cachaient la forêt des femmes invisibilisées…

Depuis pourtant plusieurs dizaines d’années, les institutions travaillent sur les mécanismes d’auto-dévalorisation et d’auto-exclusion à l’œuvre dans les comportements féminins, pour pousser les étudiantes à aller vers les sciences, toutes les sciences. Mais la démarche ne porte pas entièrement ses fruits. Les évaluations les plus récentes suggèrent qu’il faudrait aussi désamorcer les mécanismes d’exclusion qui fonctionnent à tous les niveaux : partage inégal de la parenté et de la charge domestique (voir graphique), et discriminations de la part d’un milieu trop longtemps dirigé par les hommes.

L’Étude du microbiote, une exception à la règle ?

À en juger d’après les repérages et les tournages en cours, il en ira différemment pour le documentaire « Vive les microbes ! » Erika von Mutius, Maria Yazdanbakhsh, Dominique Vuitton, Amandine Divaret-Chauveau, Donata Vercelli ou encore Tiina Laatikainen, sont en effet des références internationales de la science du microbiote et des allergies.

Ce n’est sans doute pas un hasard si, dans leur trajectoire, plusieurs d’entre elles sont passées par la pédiatrie ou par la santé publique, domaines à l’écart des avenues balisées de la réussite académique, mais dans lesquels les femmes sont mieux accueillies. Les chemins qu’elles ont empruntés auront certainement orienté leur recherche vers la valorisation de la prévention santé.

Dans leur sillage, « Vive les Microbes ! » insistera davantage sur le soin et l’environnement, que sur les dernières spécialités pharmaceutiques à la mode !

Annexes :

Figure 1 : Ministère de l'Enseignement supérieur et de la Recherche .« Vers l'égalité femmes-hommes ? Chiffres clés ». 08.03.2022 https://www.enseignementsup-recherche.gouv.fr/fr/vers-l-egalite-femmes-hommes-chiffres-cles-84053

Figure 2: temps hebdomadaire passé aux tâches domestiques. Source: Condition de travail et Risques psychosociaux 2016 DARES. Champ: Salarié.es France métropolitaine 15+. Traitement: Elsa Thery

Pour aller plus loin :

[1] Centre national du cinéma (CNC). « Observatoire de l’égalité femmes - hommes | Chiffres-clés » » 08/03/2023. https://www.cnc.fr/professionnels/etudes-et-rapports/etudes-prospectives/observatoire-de-legalite-femmes--hommes--chiffres-cles_1907308

[2] UNESCO. « Women in Science ». Page web. https://uis.unesco.org/en/topic/women-science

[3] MARRY Catherine, « Le plafond de verre dans le monde académique : l'exemple de la biologie », Idées économiques et sociales, 2008/3 (N° 153), p. 36-47. DOI : 10.3917/idee.153.0036. URL : https://www.cairn.info/revue-idees-economiques-et-sociales-2008-3-page-36.htm

[4] Ministère de l'Enseignement supérieur et de la Recherche .« Vers l'égalité femmes-hommes ? Chiffres clés ». 08.03.2022 https://www.enseignementsup-recherche.gouv.fr/fr/vers-l-egalite-femmes-hommes-chiffres-cles-84053

Holman L, Stuart-Fox D, Hauser CE (2018) The gender gap in science: How long until women are equally represented? PLoS Biol 16(4): e2004956. https://journals.plos.org/plosbiology/article?id=10.1371/journal.pbio.2004956#sec002

Sous-direction des systèmes d'information et des études statistiques (SIES). « L'état de l'emploi scientifique en France - édition 2023 ». 15.03.2023. https://www.enseignementsup-recherche.gouv.fr/fr/etat-emploi-scientifique-en-france-2023

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